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Mon voyage au FSE

Article proposé le vendredi 5 décembre 2003, par France Adine-Flamand


Un F.S.E., Forum Social Européen, à sa porte, dans son pays, ça ne se manque pas ! C’est quand même plus facile d’aller à Paris qu’à Gênes ou ailleurs…

Je voulais voir, et j’ai vu. Avec les copains de TO7, avec ceux d’ADEPES, avec quelques… 50 000 autres personnes !

Militantisme, curiosité, joie de participer de près à un phénomène important ? En bonne élève, j’avais suivi l’atelier préparatoire organisé au 3ème Forum régional pour l’Economie sociale et solidaire, j’étais inscrite, j’avais consulté le site, et j’avais sélectionné une petite vingtaine d’ateliers où me rendre…

J’arrivai le 12 novembre à la Villette que je pensais le lieu principal.

Etonnement. Avec le sourire et un ordinateur, on m’accueille, comme les quelques pèlerins qui arrivent au même moment : vive l’informatique, pas d’erreurs dans les réservations et j’ai mon « passe ». Ca a l’air très bien organisé, Avec le journal du programme que l’on me donne (56 pages !) , je commence à comprendre mon inconscience : 4 lieux principaux (La Villette, Saint Denis, Bobigny, Ivry) et pas moins de 140 adresses pour 55 réunions plénières, 265 séminaires, et plus de 300 ateliers, sans compter les manifestations culturelles, artistiques, films, concerts, spectacles… Je me sens noyée !

Je découvre, j’erre, je regarde, en attendant l’ouverture officielle. Je voyais arriver des citoyens de toute l’Europe. La rencontre n’était pas difficile et les traducteurs omniprésents. J’ai eu le temps d’étudier le programme, de sélectionner des séminaires, de voir des photos splendides « L’Argentine rebelle », ou terribles « Nous n’irons plus au paradis », l’Inde et la catastrophe de Bhopâl, tant d’années après… Mais d’inauguration : point. Elle était reculée d’heure en heure, j’ai fini par quitter La Villette avant… Le vrai « travail » ne commençait que le lendemain. Il me fallait garder mes forces !

Le Village de l’Economie Solidaire à l’Usine à Saint Denis

C’était le point de ralliement, et c’est là que j’ai retrouvé les Toulousains : Christian, Jean-Claude et Monique, Jean-François, Carole, …

Des stands ? pas beaucoup, pas très originaux.

Mais c’est un forum, lieu de débats et d’échanges, pas un lieu d’exposition esthétique … J’ai remarqué une bonne librairie, les financeurs solidaires de Finansol, la BFS [1], quelques banques solidaires, les URSCOP [2], du commerce équitable. Quelques mouvements. Beaucoup de Français et beaucoup de monde autour. Y avait-il d’autres stands dans les autres lieux ? Je ne l’ai pas su.

Obligée de réduire mes prétentions, j’avais fini par ne garder que 2 thèmes : l’économie solidaire et la Constitution politique de l’Europe. Devant le nombre de séminaires, j’avais décidé de zapper.

1er séminaire à l’Usine de Saint Denis : Des modes de vie et de travail alternatifs et solidaires pour un autre partage des richesses

L’introduction de Ricardo Petrella, professeur à l’Université de Louvain, fut d’une clarté éblouissante : « Quelles conséquences, aujourd’hui, de 50 ans de globalisation ? »

Après avoir bien distingué globalisation et mondialisation, il a analysé :

  • le développement constant de l’individualisme, au détriment de l’intérêt collectif.
  • l’accroissement des écarts entre les riches et les pauvres.
  • l’accroissement constant de la marchandisation des biens collectifs (l’eau, l’électricité, l’énergie, la santé etc….) mis au service ou réservés à l’homme naguère et devenus objets de marché.
  • l’affaiblissement politique qui en découle.

Il a exhorté à faire émerger de ce FSE un ou deux objectifs forts à travailler, à imposer dans le monde. Le premier devrait être de supprimer la pauvreté : Supprimer, martèle-t-il, pas diminuer !

S’en sont suivi des exposés forts intéressants sur le travail d’Emmaüs en France et ailleurs : « Comment, en période de chômage, aider à se réinsérer des gens par le partage des responsabilités et du travail ? Comment gérer la juxtaposition du travail bénévole et du travail salarié, le choix du salaire égal pour tous ou hiérarchisé ? » Cela m’a sérieusement rappelé nos expériences de Toulouse !

Contre la guerre globale et permanente

J’aurais voulu participer à une plénière au Chapiteau stade France à Saint-Denis : Contre la guerre globale et permanente.

Le temps que je trouve le lieu, c’était plein et impossible d’y entrer !

Mondialisation et militarisation, politique impériale, rôle des USA, rôle du Pétrole, rôle de l’OTAN, droit des peuples à disposer d’eux même et à lutter contre leur oppression.

On comprend l’intérêt et la foule !

Privatisation et marchandisation de l’Enseignement stratégie d’opposition

Donc j’ai zappé sur Privatisation et marchandisation de l’Enseignement, stratégie d’opposition. Beaucoup d’échange entre pays. Difficile à suivre pour qui n’était pas bien au courant.

3ème séminaire : Economie sociale et solidaire et alternatives politiques

un dialogue encore à construire entre mouvements sociaux et organisations d’économie sociale et solidaire.

L’exposé de Geneviève Azam fut clair, structuré, partant de l’analyse historique.

Un débat « vivant » pour ne pas dire « chaud » avec des Russes et des Roumains et mêmes des Français, militants syndicalistes, au schéma de pensée et d’actions marqués par des années de luttes des classes ou de socialisme pour l’Europe de l’Est et qui ne comprenaient pas que l’on repose le problème en d’autres formes…..

Dans plusieurs séminaires, j’ai entendu des interventions d’Européens de l’Est. Est-ce moi qui n’ai pas l’habitude ? Je trouve qu’on les reconnaît à leur culture de la dialectique, leur méthode (rigidité ? conviction ?) d’exposé.

La Constitution républicaine pour l’Europe ou l’histoire de France

Le 14 novembre, j’ai voulu participer à un atelier sur La Constitution républicaine pour l’Europe, à l’IUT de Saint Denis.

Panne de métro ? pas de conférenciers, pas d’organisateurs…

j’en ai profité pour visiter la basilique de Saint Denis, avec ses innombrables tombeaux de rois de France. L’histoire de France dans la pierre, le marbre et les couleurs des vitraux : une merveille à voir absolument, qui méritait le détour !

Pratiques sécuritaires et justices en Europe

Je n’ai pas résisté à l’envie d’aller écouter ce qui se disait des Pratiques sécuritaires et justices en Europe et j’ai beaucoup appris !

J’ai été étonné de la qualité et de l’objectivité des intervenants.

Les réseaux de coopération internationale anti-terroriste qui existaient avant le 11 septembre et qui se sont développé après.

Savez vous combien de temps la Commission de Bruxelles a mis pour sortir une directive sur la lutte anti-terroriste après le 11 septembre 2001 ?…NEUF jours ! Elle a travaillé vite !

Si la lutte anti-terroriste est légitime, encore faut-il qu’elle réponde à la définition réelle du terrorisme, donnée par la Convention des Droits de l’homme… Bien des Etats ont tendance à confondre terroriste et opposant politique.

Espace culturel

J’ai quitté ce séminaire pour un espace culturel où l’on projetait des films : Formidables, les trois documentaires que j’ai vu :

  • 10 minutes sur le « Démontage du Larzac » avec Oreste Scalzone, de Patrick Laroche, dix minutes de poésie nostalgique sur une fin…
  • « Je m’appelle » de Stéphane Elmadjian, une façon originale de traiter de la prison par des brefs portraits.
  • Ce que je cherchais pour une étude sur « Le lobbying, outil de travail, nouvelle source du Droit ou mystification » : « Le lobbying au-delà de l’enveloppe » de Myriam Tonelotto : Très instructif, ce reportage qui va passer en décembre sur ARTE. Surtout, ne le manquez pas.

Un dernier séminaire « L’Europe est-elle une puissance rivale ou une alternative à l’hégémonie des USA ? »

Passionnant, justement, par cette façon de présenter le problème autrement. J’ai été très étonnée d’entendre un Suisse démontrer avec fougue qu’il ne fallait surtout pas que l’Europe s’oppose en rivale aux USA. Il ne fallait pas qu’elle entre dans ce jeu et ce vocabulaire. Elle devait être elle-même, autonome… Autant que faire se peut.

Et après ?…

Restant sur ma faim, j’ai du reprendre le train vers Toulouse, désespérée de tout ce que je n’avais pas pu voir… mais un compte rendu de tous les séminaires sera publié sur le site du FSE. Ouf, on pourra y revenir tranquillement !

Pour passer mes heures de train, j’ai acheté les journaux du matin 15 novembre : Le Monde, Le Figaro, Libérationen lisant les éditos, j’ai reçu une gifle magistrale !

Critique extrêmement virulente de l’éditorialiste du Figaro pour qui le FSE n’était qu’un rassemblement de plaisantins irresponsables et agités, utilisant des idées ressassées et toutes faites sans rien de sérieux ni de concret !

Et s’il avait raison ?

Avais-je perdu mon temps ? Moi qui compare ces Forums aux internationales ouvrières du XIXème siècle qui sont à l’origine du mouvement syndical qui, quoi qu’on en dise et quoi qu’il soit devenu, a largement influencé notre monde… Me tromperais-je complètement ?

La lecture des éditos du Monde et de Libé ne me rassuraient guère : gentillets, favorables par habitude et assez lénifiant par politique, ils me renvoyaient à mes questions.

Et depuis j’y réfléchis.

Et si c’était ça, le Forum Social : faire réfléchir les petits citoyens que nous sommes ? Est-ce la peine d’investir autant de millions d’euros et d’énergie pour ça ? Comment passer à l’action ? Laquelle ?

Finalement, Non ! Je ne crois pas que ni Attac, ni le FSE ne soient des petits rigolos ! Et je continuerai à travailler avec !

C’est vrai que bien des choses ont déjà été dites et redites sur la globalisation et l’alter-mondialisation.

C’est bien vrai qu’il est bien difficile de définir l’économie sociale et solidaire, de passer de critères économiques quantitatifs à des critères qualitatifs…

Mais on est quand même en train de sortir de cette « pensée commune » étouffante, qui avait mis à l’index toutes les recherches, idées ou études qui n’allaient pas dans son sens. Ca ne fait pas si longtemps que ça qu’on peut en discuter, même si certaines d’entre elles ne sont plus très jeunes. Merci Attac et le FSE !

Tout le monde sait maintenant que notre planète est en danger, qu’elle est fragile. Bien sûr, ceux qui la défendent n’ont pas de canons ni d’industrie.

Ni même de stratégie satisfaisante. Mais qui ose trouver normal que les USA n’aient toujours pas ratifié le traité de Kyoto ? Merci les écolos !

Tout le monde sait maintenant que les marchés sont mondiaux et que seules les sociétés multinationales peuvent y répondre. Mais tout le monde sait aussi que ce ne sont pas elles qui s’adapteront aux besoins locaux, à la création d’une crèche ici, à l’assistance aux vieux ailleurs, aux aides à domicile, à la vie tout simplement du citoyen lambda, à une juste répartition des marges de la production à la consommation en passant par la distribution… Merci les entreprises d’économies solidaires !

Non, je ne me suis pas trompée en y allant et j’y retournerai !

Notes

[1Bourse aux Financements Solidaires

[2Unions Régionales des Sociétés Coopératives Ouvrières de Production

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