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Le collectif est un lieu de liberté morale.

Article proposé le jeudi 14 octobre 2004, par Zoubida B.


J’ai décidé de tout quitter et de venir pour 2 raisons :

  • vivre avec mes parents et ma famille
  • et parce que depuis toujours la France est le pays de mes rêves. Mais en arrivant, je n’ai pas trouvé du tout ce que j’imaginais, mais au contraire une vie très difficile, sans le moindre droit : pas de papiers, pas de travail, pas de logement… Je me trouvais dans un cercle sans issue Alors, j’ai passé quelque temps dans l’obscurité de mes idées. Je souffrais en silence, je n’avais plus aucun espoir.

C’est alors que comme par enchantement, je vis une petite étincelle et une grande porte s’ouvrit. L’obscurité commençait à s’éclaircir. C’était la porte du collectif des sans-papiers et de leurs Amis.
Quelle joie ! J’avais enfin trouvé ce dont j’avais besoin : des amis qui m’écoutent et me redonnent confiance en moi.
Et depuis, je suis au Rassemblement des Sans-papiers et de leurs Amis.
C’est un collectif extraordinaire, car on se bat une raison très noble : pour que tous les sans-papiers puissent avoir le droit comme tout le monde et dans tous les domaines.

Dans le collectif, on étudie la loi une fois par semaine, on donne des conseils à ceux qui en ont besoin et nous préparons nos tracts nous-mêmes. On les distribue dans quelques quartiers, on fait des manifs, et on a une AG tous les premiers samedis du mois.

Le plus beau de tout c’est que notre collectif ne dépend d’aucun organisme. Il n’y a personne derrière, pas de partis. Il ne dépend que des sans-papiers et de leurs amis. On fait tout seuls, c’est nous qui faisons marcher notre collectif.

On se bat pour changer les lois qui nous rendent la vie impossible et pénible.
Cette loi, c’est un châtiment infligé aux gens qui ont choisi de vivre en France. Pas un châtiment pour un criminel, mais un châtiment pour des personnes innocentes qui veulent vivre tranquillement dans un pays qu’elles aiment. Moi, personnellement, j’avais une autre idée sur la France et ses lois, mais hélas, ici, sans le bout de papier de la préfecture, l’être humain ne vaut presque rien.
La loi doit changer, pour le bien de tout le monde. Car il y aura moins de problèmes si tout le monde est régularisé. Quand il n’y a pas d’égalité, on se sent inférieur, on n’ose pas discuter tranquillement avec quelqu’un qui a les papiers et tous les droits Pour moi, l’être humain le droit de vivre où il veut, sans avoir à rendre de compte à une préfecture.
Et ceux qui ont les papiers nous craignent, se méfient de nous.

Quand la paix règne, c’est pour tout le monde, pas que pour les sans-papiers. Notre collectif nous fait vivre dans un océan de paix et d’égalité, et comme ça on se sent moins délaissé, moins négligé dans un pays aussi civilisé que la France.

Ce qui me plaît aussi dans le collectif, c’est qu’il n’y a pas de hiérarchie, pas de « sous-métier ». On fonctionne avec l’égalité, ceux qui connaissent plus donnent à ceux qui connaissent moins.
C’est une qualité qui donne aux sans-papiers la force de parler, de s’exprimer, de se révolter, de se battre. Le collectif c’est le seul endroit où le sans papier se sent à égalité avec les autres.

Au collectif, les sans-papiers se sentent utiles : quand on fait les réunions, qu’on discute pour faire un texte qu’on distribue les tracts, ça donne du courage, on compte.

Avant de connaître le collectif, je ne connaissais pas les lois, je ne pouvais pas répondre aux questions.
Depuis que je suis au collectif, ça me fait plaisir de pouvoir présenter ce que j’ai appris au Rassemblement, donner des conseils à ceux qui arrivent. C’est utile.

Dans le collectif, on se fait des amis. C’est difficile de nouer une amitié en dehors du collectif, parce que le sans papier n’est pas à égalité avec les autres. Mais là, on sait ce que tu veux, ce que tu vaux, et ça donne une paix intérieure, une sérénité.

Je lance un appel aux gens qui hésitent, qui viennent d’arriver, qui ne connaissent personne, qui craignent les lois. Je leur dis de venir au Collectif où ils apprendront beaucoup de choses et se sentiront entourés.

La première fois que j’ai assisté à une manif, je craignais d’être capturée, je ne savais pas ce qui allai se passer, j’avais peur. Mais j’ai vu comment ça se passait, j’ai compris qu’on était une force, et ça s’est bien passé

L’intervention à St-Sernin m’a marquée. On avait décidé de distribuer notre tract contre les contrôles policiers sur les marchés, parce que la semaine précédente, il y avait eu des descentes de police sur le marché de la Faourette pour contrôler les sans-papiers. Ce dimanche-là, il y avait 8 cars de CRS garés à St-Sernin, et les CRS patrouillaient sur le marché J’avais une peur énorme. Quand j’ai vu les policiers, j’avais les tracts dans les mains, mais comme par enchantement, j’ai eu du courage, le courage de dire : « Je suis là, je ne commets pas de délit. J’ai le droit d’être là, en France » Pour moi, ça a marqué un changement : j’avais des amis, j’étais bien entourée. Je ne me sentais plus menacée par les policiers.

Moi, j’ai bien envie de continuer avec le Rassemblement, même quand j’aurai les papiers, et que ma situation s’améliorera. On se bat pour de bonnes raisons.
Je ne me bats pas seulement pour avoir mes papiers, mais surtout pour changer les lois.
La loi de 10 ans est la pire, car le gouvernement français oblige les gens à vivre 10 an s dans le pays dans les conditions les plus pénibles. C’est une loi sauvage, une loi faite par des gens qui ne sont pas civilisés.
Elle amène beaucoup de souffrances, et incite à faire des bêtises, parce qu’elle oblige les gens à survivre et non à vivre. Ils doivent vivre au jour le jour, sans pouvoir faire de projet.
Les ouvriers sans-papiers travaillent beaucoup, péniblement, dans des conditions incroyables mais vraies, mais ils n’ont aucun droit, aucun pouvoir, un salaire minable. Les trois-quarts de la France ont été bâtis par des étrangers, dont beaucoup d’ouvriers sans-papiers. Mais on les trouve rarement logés dans les bâtiments qu’ils ont construits ! Ca me touche

Je n’ai pas envie de baisser les bras jusqu’à gagner tous les droits. Il faut que les députés traitent les gens du pays à égalité, qu’ils donnent les droits à tout le monde.

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